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En vallée d’Aspe – Les bouquetins à la sortie de l’hiver

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06 mars 2024 – Baptiste, Hardi, Mojito, Thozenn, Espoir, Francky et les autres.

Depuis les six lâchers étalés du 11 avril 2019 au 31 mars 2021, que deviennent les Bouquetins de la vallée d’Aspe? Ils ne font plus les titres de l’actualité mais ils prospèrent, sans se faire trop remarquer.

Pour mémoire (ma publication « Les Bouquetins de la vallée d’Aspe » du 11 février 2022), 39 bouquetins au total ont été relâchés et 29 d’entre eux étaient vivants en novembre 2021. En comptabilisant les naissances, les effectifs étaient alors constitués de 17 étagnes, 12 boucs, 4 éterles et éterlous (il était encore trop tôt pour les différencier) et 11 cabris, pour un total de 44 animaux.

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I- Le suivi des bouquetins de la vallée d’Aspe en 2022 et 2023

En 2022, 11 des 13 étagnes présentes sur les hauteurs d’Accous ont mis bas, dont une avec des jumeaux ; 12 naissances de cabris! L’une de ces étagnes, âgée de 2 ans et née en Haut-Béarn, a eu déjà un jeune alors que l’âge habituel pour une première portée est d’au moins trois ans. C’est un signe de bonne vitalité de l’espèce, qui s’est bien acclimatée à son nouvel environnement. La meilleure productivité chez les femelles se situe entre 4 et 13 ans, avec un maximum aux alentours de 8 à 10 ans.

Fin 2022, le noyau de la vallée d’Aspe a ainsi dépassé les cinquante individus. Ce n’était pas précisé, mais il s’agit toutes générations confondues.

Pour le suivi du plan de restauration de l’espèce dans les Pyrénées, les comptages des bouquetins non marqués (nés sur place) se doivent d’être précis. Il est en principe d’usage de ne pas inclure les jeunes cabris car leur taux de survie est incertain. Les premières semaines de leur vie, ils affrontent les risques de prédation et plus tard, la rigueur hivernale et ses épisodes d’avalanches.

Pour 2023, je n’ai pas retrouvé de statistiques officielles sur les naissances. Cependant, l’année est globalement considérée comme meilleure que 2022 sur l’ensemble de la population des Pyrénées françaises. Le noyau de la vallée d’Aspe devait alors être constitué d’une soixantaine d’individus, à la condition bien sûr qu’ils soient restés fidèles au site de réintroduction et de naissances.

Cette année 2024, la population béarnaise autochtone âgée de plus d’un an va dépasser la population introduite (si cela n’a pas été déjà le cas en 2023), trois ans après le dernier lâcher de mars 2021.

L’ambition du projet de réintroduction du Bouquetin ibérique est de coloniser petit à petit le Parc national et à plus long terme, favoriser son retour sur l’ensemble des Pyrénées. Il est constitué de cinq noyaux de lâchers côté français (2 en Ariège, 2 autres dans les Hautes-Pyrénées et le dernier, en vallée d’Aspe) et un noyau en Catalogne espagnole.

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II- Mon observation des bouquetins à la sortie de l’hiver 2023-2024

Par cette belle après-midi ensoleillée de début mars 2024, j’ai pu observer au-dessus d’Accous quelques bouquetins évoluer sur une pente enneigée pendant environ deux heures 30.

Un joli groupe de boucs m’a particulièrement interpelé. Six d’entre eux ont été relâchés entre avril 2019 et septembre 2020 et portent un nom : Francky, Espoir et Baptiste (nés en 2015), Hardi et Mojito (nés en 2016), Thozenn (né en 2018). Ces mâles n’ont plus de collier en 2024. Les six autres, non marqués, font partie des nouvelles générations béarnaises nées à partir de mai 2020.

J’ai pu également identifier un groupe constitué de trois étagnes, Biquette, Myrtille et Gene, en compagnie de leur progéniture et temporairement de jeunes boucs autochtones. Un septième mâle marqué, Julca, a évolué seul entre le groupe des étagnes et celui des boucs.

J’ai pu également identifier l’étagne Babeth qui évoluait également à part sur la même pente enneigée, en compagnie d’un cabri et d’une éterle.

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2-1 « Harde » ou « groupe » de bouquetins

En fait, j’hésite régulièrement entre les termes harde et groupe pour désigner un regroupement de bouquetins : dans la littérature, les 2 termes sont utilisés. Une harde est un troupeau de ruminants sauvages vivant ensemble, sans précision sur le nombre. Un groupe comprend un certain nombre d’individus (au minimum 2) en interaction, avec des caractéristiques spécifiques : hardes, troupeaux, meutes, vols, bancs, etc.

Dans ses « Analyses et suivi démographique de la population de bouquetin ibérique (Capra pyrenaica) dans les Pyrénées ariégeoises depuis sa réintroduction en 2014 » publié en août 2020, le Parc Naturel Régional des Pyrénées Ariègeoises n’utilise que le terme « groupe ». Il précise : le seuil minimal de quatre animaux a été retenu pour la considération du terme « groupe », sans mention d’âge.

En Espagne, on utilise également le terme « groupe » pour les recensements, mais à partir d’un individu isolé. C’est ce que faisait aussi l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage (devenu l’Office Français de la Biodiversité O.F.B.) pour les recensements du Bouquetin des Alpes, dans sa fiche éditée en 2015.

Il faudrait aussi faire intervenir une valeur de distance minimale entre 2 groupes pour considérer qu’ils sont bien distincts. L’Office Français de la Biodiversité (O.F.B.) considère 2 groupes comme distincts lorsqu’ils sont séparés de plus de 50 m.

J’utiliserai ici de préférence le terme « groupe », qui représente pour moi un regroupement qui se constitue et peut se défaire rapidement selon les circonstances ; « harde » me semble être lié à un comportement dans la durée.

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2-2 L’identification des bouquetins

Le suivi visuel des bouquetins relâchés est effectué par l’identification de deux boucles auriculaires avec un code unique conjuguant différentes couleurs (jaune, vert, rouge, blanc, bleu, parme et orange) et une numérotation individualisée différente pour chaque oreille. Chaque boucle a 2 plaques, avec le numéro sur la face extérieure permettant de le lire des deux côtés. Il est complété lors du lâcher par un collier qui dispose d’une bande blanche sur chaque côté du cou (plaques d’identification identiques à deux lettres majuscules disposées verticalement) et encadrant une bande de couleur bien visible sous le menton. Ce collier est un moyen supplémentaire pour aider à l’identification visuelle sur des animaux dont l’une des boucles ne serait pas visible lors de l’observation. Aujourd’hui, certains de ces animaux marqués n’ont plus de collier.

Une forte luminosité peut compliquer la lecture des couleurs de marquage auriculaire :

_ le blanc (12 animaux) peut laisser croire à un jaune délavé,

_ le parme (8 animaux) peut laisser croire à une absence de marquage quand il est délavé,

_ le bleu (4 animaux) et le vert (10 animaux) peuvent se confondre quand ils sont délavés,

_ l’orange est peu utilisé (3 femelles). Observé en 2022 sur une oreille de Nat, on le devine bien.

_ le rouge (9 animaux) et le jaune (7 animaux) sont bien discernables. La numérotation est parfois difficile à lire sur le rouge.

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2-3 Cabris, éterles/éterlous, jeunes étagnes, jeunes boucs, comment les différencier?

Le jour de mon observation, les cabris sont déjà grands ; ils ont 9 mois et vont devenir des éterles (femelles, de 1 à 2 ans) et des éterlous (mâles, de 1 à 2 ans).

De même, les éterles et les éterlous vont devenir d’ici 3 mois de jeunes étagnes et de jeunes boucs. Bien que la reproduction pour les jeunes étagnes a généralement lieu à compter de 2 ans et demi, voire 3 ans et demi, il est déjà arrivé en 2021 que l’une d’entre elles participe au rut de fin d’année, à 18 mois. Quant aux jeunes boucs, ils attendront encore car seuls les mâles les plus forts ont des chances de s’imposer.

La distance importante d’observation a particulièrement compliqué mes identifications chez les bouquetins de moins de 2 ans, nés en 2023 et 2022 ; l’erreur est possible, comme j’ai pu d’ailleurs le constater chez d’autres auteurs.

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J’ai principalement utilisé les caractéristiques des cornes (longueur, diamètre, forme) comme critères d’âge et de sexe, ainsi que la corpulence :

_ L’étagne a des cornes de taille modeste, de 15 à 20 cm de longueur en moyenne.

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Début mars 2024 – Une étagne, photo recadrée. 

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_ En fin de 1ère année, les cornes du cabri sont annelées à la base, légèrement recourbées vers l’arrière ; elles peuvent dépasser un peu des oreilles. Celles du mâle sont manifestement plus épaisses que celles de la femelle qui restent aussi un peu plus courtes. C’est suggestif, il est difficile sinon impossible de les différencier de loin. A la sortie de l’hiver, il est aussi possible de confondre de loin un cabri mâle avec une éterle.

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_ Entre 1 et 2 ans, éterle ou éterlou, l’animal est plus petit que l’étagne adulte. Au début de sa troisième année, l’éterle est devenue une jeune étagne ; elle sera proche de sa taille définitive. Le mâle continuera à grandir.

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Début mars 2024 – Cette photo recadrée est intéressante car nous avons 3 générations représentées, avec 2 cellules familiales : à gauche, 2 cabris nés en 2023 avec des cornes de face et de mi-profil ; au milieu, 2 éterles avec des cornes de profil et de dos manifestement plus longues et recourbées bien que plus petites que celles de leurs mères adultes ; à droite, les 2 étagnes mères avec des cornes de profil.

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_ Les cornes de l’éterlou grossissent rapidement et vont devenir similaires en longueur à celles d’une étagne, mais elles seront plus épaisses.

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Début mars 2024 – Etagne suivie d’un éterlou.

_ Les cornes de l’éterle s’allongent moins vite et tout en restant fines, elles seront plus petites que celles de sa mère. Au cours de la troisième année, la jeune étagne a des cornes bien développées et elles n’évolueront plus que très lentement.

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Début mars 2024 – Etagne, cabri et à droite, une éterle dont la corpulence est intermédiaire.

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_ Les mâles adultes autochtones de la vallée d’Aspe ont 4 et 3 ans. L’observation comparative de la morphologie des cornes ne laisse pas de place au doute pour discerner les générations nées en 2020 et celles nées en 2021. De plus, parmi les quatre premières naissances de cabris de l’année 2020, comme au moins une femelle en fait déjà partie, il ne peut y avoir tout au plus que 3 boucs âgés prochainement de 4 ans le jour de mon observation. S’il y en 4 qui se ressemblent étrangement, ils sont à coup sûr âgés de 3 ans.

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Début mars 2024 – Un bouc de 4 ans, suivi de deux boucs de 3 ans.

_ Les cornes d’un bouc de 3 ans sont manifestement plus longues et plus épaisses que celles d’une étagne. Tout en ayant des formes très variables, les cornes d’un bouc de 4 ans commencent déjà à bien se torsader.

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Il existe d’autres détails de comportement qui m’ont aidé à la décision :

_ En dehors de la période du rut, les boucs vivent à l’écart des étagnes, qui sont accompagnées de leurs cabris de l’année et des éterles de l’année précédente. Toutes les étagnes ne donnent pas obligatoirement naissance à un (parfois deux) cabri(s) chaque année. Le cabri reste à côté de sa mère et l’éterle à proximité.

_ Les éterlous sont généralement chassés par leur mère à la naissance suivante ou alors par les boucs reproducteurs au moment du rut. Ils forment alors un groupe à part, où se joignent parfois quelques jeunes boucs. Au début de la réintroduction de l’espèce, les comportements ne semblent pas toujours bien marqués en dehors du rut : on peut ainsi voir de jeunes boucs ou des éterlous dans le voisinage immédiat d’étagnes.

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2-4 Le déroulement de mon observation des bouquetins

La coloration des robes de l’étagne et de sa progéniture est proche de celle du milieu naturel ; les animaux se fondent alors dans le paysage et particulièrement à la mauvaise saison. Elle leur permet de se dissimuler à la vue de leurs prédateurs. Il est souvent difficile de localiser les animaux au repos. Heureusement, leur déplacement et la présence de neige favorisent l’observation.

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Tout commence par l’observation de deux étagnes sur les hauteurs, accompagnées de leur cabri. 

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La même photo, au recadrage maximal sans trop dégrader. Le petit groupe se repose au soleil, plein sud. Les 2 étagnes ne sont pas marquées ; ce sont des autochtones âgées au plus de 4 ans.

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Un peu plus bas, un bouc apparaît, reconnaissable de loin à des cornes plus longues que celles d’une étagne et à la robe plus sombre sur son poitrail.

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C’est un autochtone.

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Il n’est pas seul! Un 2ème mâle apparaît à son tour ; il est bien plus âgé, aux belles cornes torsadées et au poitrail bien sombre, …

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…, suivi de deux autres bouquetins. Quatre bouquetins au total.

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La photo précédente, recadrée pour le 1er bouc apparu ; il fait une halte pour se gratter, 

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Egalement recadrée pour le 3ème bouquetin apparu qui se toilette ; c’est aussi un mâle autochtone,

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Recadrée pour le 4ème bouquetin. Ses cornes sont moins développées que celles de ses 2 congénères autochtones et son corps est moins massif. 

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Les longues cornes du grand mâle lui permettent de se gratter le dos, l’arrière-train et … le reste. Il est marqué et je vais pouvoir l’identifier. Deux des trois autres mâles autochtones lui emboîtent le pas.

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Ces deux boucs ne sont pas de la même génération.

Le bouc de gauche est plus corpulent, son poitrail est plus sombre et ses cornes sont plus développées. Il fait partie des 4 naissances de mai 2020 et celui de droite, des 11 naissances de 2021. Ils vont me servir de référence pour les identifications de mâles adultes de 4 et 3 ans.

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Le 4ème mâle, qui a une tête presque juvénile sans tenir compte des cornes, est un éterlou.

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Le grand mâle descend au trot avec un but précis, suivi uniquement par le bouc de 4 ans.

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Le bouc de 3 ans et l’éterlou resteront en retrait.

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Ce grand mâle a un marquage auriculaire blanc à sa gauche et jaune à sa droite.

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Une photo très recadrée me permet de confirmer l’identité de ce bouc, qui porte le numéro 052 sur son marquage gauche : il s’agit de Francky, né en 2015 et relâché il y a 5 ans, le 11 avril 2019.

L’emplacement et l’importance des tâches sombres chez les mâles de plus de 3 ans permet à un œil exercé de distinguer leur classe d’âge, procédé utilisé pour les recensements de la population d’un noyau déjà développé.

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Les deux animaux descendent en direction de ce groupe en contrebas à la limite de la forêt, où au moins sept autres animaux d’âges divers broutent tranquillement.

Tout en haut, il s’agit de Thozenn, à la robe encore claire et avec un marquage auriculaire droit Blanc portant le numéro 049. Il est né en 2018 et il a été relâché il y a 3 ans et 1/2, le 18 septembre 2020. Il aura bientôt 6 ans. Tout en bas et au centre, nous avons Baptiste, le seul bouc ayant un marquage auriculaire Bleu à l’oreille droite ; lâché le 21 août 2019, il est né en 2015 et aura donc bientôt 9 ans.

Parmi les 5 autres animaux, nous avons trois boucs dont l’un est âgé de 3 ans. Les deux autres sont dans une position où il m’est difficile de me prononcer mais ils ont plus de 3 ans (j’aurais l’occasion de les identifier plus tard). Les deux derniers, situés à la droite de Thozenn, ne sont pas très faciles à identifier : cabris mâles ou éterles.

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Les cornes, encore petites, sont épaisses à la base. Ce pourrait être un cabri mâle et l’autre, de dos, lui ressemble beaucoup. Il n’y aurait rien d’étonnant à cette présence car un groupe d’étagnes est à proximité. En tenant compte du fait que les cabris ne s’éloignent guère de leur mère, je pense par déduction qu’il s’agit en fait d’éterles.

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Une petite coulée dévale la falaise dominant la scène animalière.

Une récente chute de neige a poussé tous les animaux vers la bas du vallon, les mettant un peu plus à portée de mon téléobjectif. Il fait très chaud et j’assisterai à plusieurs coulées.

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Un petit groupe d’étagnes suitées apparaît au-dessus de la forêt.

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La photo précédente, recadrée.

En tête du petit groupe et avec ses boucles auriculaires Blanche à gauche portant le numéro 041, Rouge à droite, nous avons Biquette, née en 2015 et relâchée le 31 juillet 2019. Elle est entourée de 2 cabris et juste derrière elle, une éterle.

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Biquette observe le mouvement d’autres bouquetins en contrebas, que j’aperçois difficilement au travers des arbres dépouillés de leurs feuilles.

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Au moins quatre autres bouquetins remontent la pente.

Au premier plan, un bouc dont l’âge est difficilement identifiable regarde dans ma direction au travers des branches. A l’arrière-plan, une éterle (en tête) et un jeune mâle encadrent une étagne marquée. Ce mâle a une corpulence qui approche celle de l’étagne et ses cornes sont plus épaisses ; c’est un éterlou.

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Photo recadrée – Cette deuxième étagne marquée porte un collier avec une plaque rouge et les lettres AR. 

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La boucle auriculaire gauche est bleue, avec le numéro 023. Il s’agit de Myrtille, née en 2013.

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Myrtille et l’éterle ont rejoint Biquette. Le bouc et l’éterlou restent en retrait. Il y a encore du monde un peu plus bas.

En bas sur le bord droit de la photo ci-dessus, on aperçoit un autre bouquetin marqué. Il porte un collier dont je n’arrive pas à lire la plaque et dont je ne vois pas la couleur mais les deux boucles auriculaires sont Rouges : il ne peut s’agir que de Gene, née en 2013 et relâchée le 31 juillet 2019 en même temps que Biquette. Elle avait donné naissance à un cabri dès le mois de mai 2020.

Gene ne paraîtra pas à découvert. Elle restera en compagnie d’autres bouquetins, que je ne verrai pas. Je ne sais pas si elle était suitée.

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Photo recadrée – Myrtille (en bas) et Biquette avec un cabri.

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Après avoir agrandi plusieurs photos, j’identifie le bouc qui est maintenant à découvert en bas à gauche comme étant Julca, avec ses boucles auriculaires Parme à gauche, Jaune à droite.

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Julca. La couleur Parme de sa boucle gauche est délavée et ne ressort pas devant sa robe ; on aperçoit juste la numérotation.

L’erreur est possible pour l’identification de Julca ; il ne se présente pas correctement pour lever tout doute sur l’identification de la couleur Jaune de l’autre boucle et il n’a pas de collier. De plus, il n’a pas les tâches sombres qu’il devrait avoir sur sa robe pour un bouc de bientôt 7 ans. En tous cas, ce mâle est marqué et reste un peu à l’écart du groupe d’étagnes. Julca est né en 2017 et a été relâché le 18 septembre 2020, en même temps que Thozenn.

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Le groupe des étagnes continue sa progression à découvert en s’alimentant. GENE n’a pas suivi le mouvement.

Un bouc, au-dessus du groupe de ces étagnes constitué de 7 individus, se rapproche en broutant ; 8 animaux au total sont maintenant présents. Ce nouveau venu autochtone est âgé de 3 ans. Il peut s’agir de celui apparu plus tôt avec Francky et resté ensuite en retrait. Julca, en contrebas, ne fait pas partie du groupe et il continue sa progression isolée.

Cette scène est intéressante car elle montre qu’en phase de réintroduction, des boucs peuvent parfois côtoyer de près des étagnes en dehors de la période du rut.

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Je continue mon observation en revenant vers le groupe des boucs que Francky avait l’intention de rejoindre.

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Je retrouve alors Thozenn (à gauche), suivi en contrebas par le vénérable Espoir, né en 2015 et relâché le 11 avril 2019. Tout en haut, Julca s’est avancé ; il a continué son chemin en s’éloignant de Biquette et Myrtille.

Je n’identifierai Espoir à coup sûr qu’un peu plus tard, car 3 boucs ont un marquage auriculaire Rouge à l’oreille gauche ; Espoir est identifiable à coup sûr à son marquage Vert à l’oreille droite, non visible sur cette photo. Les 2 boucs autres boucs, non marqués, ont 3 ans.

Julca va rester aussi à l’écart du groupe des boucs ; on a sur la photo suivante une vue d’ensemble de la répartition d’une grande partie de ces boucs et étagnes.

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La vue d’ensemble de l’observation des deux groupes, boucs et étagnes. Pas facile d’y repérer les bouquetins! On peut remarquer que tout en restant séparés, les boucs et les étagnes peuvent rester à proximité les uns des autres.

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Sur la même photo, le groupe des boucs est encadrée en rouge et le groupe des deux étagnes Biquette et Myrtille, en bleu. 

Le cadre des boucs est constitué de 13 animaux, un groupe de 12 mâles et Julca à part, tout en haut à droite des arbres et à mi-chemin entre les boucs et les étagnes.

Le groupe de mâles est constitué de 6 boucs marqués et 6 boucs autochtones dont quatre sont âgés de 3 ans ; les deux autres sont âgés de 4 ans, dont celui qui se tient droit, en bas du cadre.

Le cadre des étagnes comprend toujours 8 animaux. Tout en haut, dans un troisième cadre, il s’agit probablement de l’éterlou qui n’avait pas suivi Francky et qui est resté en retrait.

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Le groupe des étagnes, encadré en bleu sur la précédente photo. 

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La même photo, annotée. Dans la partie supérieure : Myrtille, un cabri, un éterlou, une éterle, Biquette couchée, un bouc de 3 ans couché, une éterle, un cabri couché. En-dessous de Myrtille, Julca chemine seul.

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Je reviens vers mon groupe d’étagnes, qui continue à brouter tout en se dispersant sur la pente partiellement enneigée.

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Biquette, précédée de son cabri et suivie de son éterle, s’est éloignée du groupe.

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Myrtille, avec son cabri (au-dessus) et son éterle, se nourrit à proximité du bouc de 3 ans et l’éterlou, ces deux derniers étant hors cadre.

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Une étagne non marquée accompagnée de sa progéniture se rapproche de Myrtille

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Photo précédente, recadrée. J’ai eu du mal à identifier sa progéniture, une éterle en haut et un cabri.

Remarque : l’étagne ci-dessus est probablement celle qui, née en 2020, a déjà donné naissance en mai 2022 à son premier cabri.

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L’éterle émerge la première.

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Maintenant, l’étagne non marquée (la 3ème aujourd’hui) et sa progéniture ont rejoint le bouc et l’éterlou (en haut). Le groupe de Myrtille est à nouveau constitué de 8 individus.

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Encore plus haut, une autre surprise m’attend, avec un petit groupe de trois bouquetins. L’un d’entre eux est marqué : il s’agit de l’étagne Babeth, reconnaissable aisément en zoomant sur la bande blanche de son collier où apparaissent les 2 lettres majuscules AB, ainsi qu’à ses marquages auriculaires Vert. Née en 2015 et faisant partie du premier lâcher de bouquetins du 11 avril 2019, elle a la particularité d’être l’une des quatre femelles ayant donné naissance aux premiers cabris de la vallée d’Aspe en 2020.

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Une éterle, un cabri et la responsable, l’étagne Babeth.

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Je vais par la suite m’intéresser exclusivement au groupe des boucs, dont certains éléments sont très photogéniques. Les bouquetins ibériques sont des animaux plutôt placides qui n’ont pas peur des humains : cette remarque est surtout valable pour les vieux boucs, sûrs de leur force. Les étagnes restent généralement plus farouches mais surtout les cabris : leur survie est en jeu.

La tentation est grande pour les approcher au plus près pour tenter de faire de « belles » photos : cela n’est pas sans conséquences, comme la perturbation de leurs habitudes de vie et la familiarisation à une présence humaine qui s’avère dans certains situations plutôt néfaste. Malgré cette apparente quiétude, les animaux peuvent être stressés même s’ils courent rarement pour fuir.

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Le groupe des mâles, qui va bientôt se disperser.

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Les six mâles relâchés annotés sur la photo, accompagnés de 4 boucs de 3 ans et 2 boucs de 4 ans. 

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Espoir est le premier à s’éloigner du groupe (marquage Rouge à gauche, Vert à droite).

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Francky le suit d’un pas décidé, trois minutes plus tard. Ils ont tous les deux 9 ans, relâchés ensemble en 2019. On peut remarquer la similitude des taches sombres sur leur pelage.

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Trois autochtones (dont un des deux boucs de 4 ans) on rejoint Espoir, suivis de deux mâles relâchés aux taches sombres plus clairsemées :  Baptiste (au-dessus d’Espoir) et Mojito à sa droite (marquage Vert à gauche N° 107 et Rouge à droite sur d’autres photos). Thozenn est sur la droite, hors cadre.

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Francky, à gauche, a rejoint le groupe. Baptiste, au centre, est maintenant bien reconnaissable ; il est le seul à porter un marquage bleu à l’oreille droite.

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Thozenn, en contrebas, en compagnie des 3 autres boucs autochtones (dont le second âgé de 4 ans).

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Thozenn, fondu dans le décor.

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Espoir (devant) en compagnie de Francky.

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Un jeune bouc puis Espoir, dominés par Francky

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Francky, à l’écoute.

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Hardi, à l’écart, reconnaissable à ses marquages Vert à gauche (N° 111) et Blanc à droite.

Hardi, né en 2016 et relâché en même temps que Francky et Espoir, leur ressemble beaucoup ; de loin, il a quasiment la même répartition des taches sombres sur son pelage.

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La quiétude des bouquetins va être perturbée par un bruit causé par un danger de la montagne, l’avalanche.

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Un couloir d’avalanches barre la progression du groupe de Francky, Espoir, Baptiste, Mojito, Thozenn et autres autochtones, neuf au total.

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Mojito s’avance dans le couloir d’avalanches.

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Baptiste le surveille mais ne le suit pas. Mojito va renoncer.

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Un bruit déclenche la fuite du groupe. Baptiste en tête, suivi de trois autochtones de 3 ans, Francky, Thozenn (marquage blanc 049 à l’oreille droite), un bouc de 4 ans, Mojito et Espoir.

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Tout ce monde s’éloigne rapidement, à la queue leu-leu.

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Les petites coulées brisent régulièrement la quiétude du vallon. On n’entend plus alors le cri des Chocards à bec jaune (Pyrrhocorax graculus) qui évoluent le long de la paroi.

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III- Le bilan des bouquetins observés ce 06 mars 2024

3-1 Petites informations générales

Les bouquetins semblent rester plus ou moins fidèles à leur territoire de lâchers. Cela ne les empêche pas, bien sûr et en particulier les mâles, de prospecter plus largement.

En 2021, on n’avait pas mis en évidence de connexion entre les principaux noyaux que sont aujourd’hui ceux de Cagateille et du Mont Béas en Ariège, ceux de Cauterets et de Gavarnie-Gèdre dans les Hautes Pyrénées, et le noyau d’Accous dans les Pyrénées-Atlantiques. On peut penser pour le moment que tous les bouquetins non marqués observés en vallée d’Aspe sont des autochtones. À long terme, le bouquetin devrait cependant coloniser une bonne partie des Pyrénées.

Toutes les populations relâchées côté français sont issues de la sierra de Guadarrama (à proximité de Madrid) : sur le long terme, cela peut entraîner une diminution de la capacité d’adaptation des populations par augmentation du niveau de consanguinité. L’apport de diversité génétique avec des lâchers d’animaux prélevés sur d’autres sites en Espagne reste envisagé.

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Mon observation d’aujourd’hui m’a permis de voir quand même « pas mal de monde », sous une météo très propice. Elle a eu lieu entre 14h00 et 16h30, heure à laquelle les bouquetins étaient encore observables. Ils se sont déplacés spatialement, tout en passant la majorité de leur temps à s’alimenter ; peu de repos.

Depuis novembre 2021 avec 17 étagnes et 12 boucs relâchés toujours vivants, je ne dispose pas de bilan détaillé sur l’évolution de la survie et sur les déplacements de cette population. En 2022, 13 étagnes étaient comptabilisées sur les hauteurs d’Accous pour la mise bas, dont au moins l’une d’entre elles était née en Haut-Béarn. Il y avait donc à ce moment-là au moins 12 étagnes relâchées toujours présentes.

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3-2 Bilan de mon comptage partiel de bouquetins de mars 2024

A) Boucs relâchés : 7 observés sur un total de 12 potentiellement vivants.

Il s’agit de :

_ Francky, Hardy et Espoir, relâchés ensemble (lâcher #1) ; Baptiste et Mojito, relâchés séparément (lâchers #3 et 4) et je les ai déjà observés ensemble en janvier 2022, avec Francky.

_ Thozenn et Julca, âgés de 6 et 7 ans, relâchés ensemble (lâcher #5) le 18 septembre 2020.

B) Étagnes relâchées : 5 sur un total de 17 potentiellement vivantes.

Il s’agit de :

_ Biquette, Myrtille, Nat et Babeth, qui ont donné naissance en 2022 et 2023,

_ Gene, dont l’observation est incomplète ; je ne sais pas si elle était suitée.

C) Boucs autochtones : 7

_ 4 ans d’âge : 2 sur un total de mâles inconnu mais sur un total général de 4 naissances (issues de Babeth, Lazagne, Mimi et Gene ici présente) dont au moins 1 étagne avérée ; il est donc au plus égal à 3. Par déduction, le nombre d’étagnes autochtones de 4 ans est au plus égal à 2, s’il n’y a que deux mâles du même âge.

_ 3 ans d’âge : 5 sur un total de mâles inconnu mais un total général de 11 naissances. Par déduction, le nombre d’étagnes autochtones de 3 ans est au plus égal à 6.

D) Étagnes autochtones : 3, sur un total général au plus égal à 8. Elles peuvent être âgées de 4 ans (au nombre maximum de 2)  ou de 3 ans (au nombre maximum de 6).

Parmi ces 3 étagnes observées :

_ 1 étagne avec un cabri de 2023 et une éterle de 2022. Elle est obligatoirement née en 2020.

_ 2 étagnes avec un cabri de 2023 chacune ; une peut être née en 2020 et l’autre en 2021, ou les deux en 2021.

E) Eterlous : 2

Il y a eu 12 naissances en 2022 (dont 2 jumeaux, sans parler du sexe). Hors mortalité, le total général d’éterles/éterlous dans la Nature début mars 2024 est donc de 12. Si toutes les éterles étaient présentes, le total des éterlous ne peut dépasser 8.

F) Eterles : 4 

De même, si tous les éterlous étaient présents, le total des éterles ne peut dépasser 10.

G) Cabris : 6 mais je ne connais pas le nombre total de naissances 2023.

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Tout le long de l’observation, la composition ders groupes a régulièrement évolué ; j’ai éliminé les doubles comptages possibles. J’ai vu au total 28 individus de plus d’un an (dont 12 marqués) et 6 juvéniles de moins d’1 an.

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3-3 Les absents de la journée

Il y avait, bien sûr, des absents ; 29 individus de plus d’un an. Leur nombre peut être inférieur à ce que j’indique, s’il y a eu de la mortalité ou des déplacements dans d’autres vallées :

_ Boucs relâchés : 5

Ce sont : Batman (11/04/2019) ; Pat, Paulo, Bouba et Champi (18/09/2020).

_ Étagnes relâchées : 13

Ce sont : Lazagne, Mimi, Etoile (observée en 2024), Avril, Chipie, Vanesse, Nat, Meidjo, Poca, Sab, Isa et Lilou (observée en 2024).

_ Boucs et étagnes autochtones : le nombre total de naissances concernées étant de 15 et 10 ayant été observés, il n’y a que 5 absents tous sexes confondus dont potentiellement 1 bouc ou 1 étagne de 4 ans.

_ Eterlous et éterles : le nombre total de naissances ayant été de 12 et 6 ayant été observés, il y a 6 absents tous sexes confondus.

_ Juvéniles : je ne connais pas le nombre de naissances en 2023 parmi les au moins 20 étagnes potentiellement en âge de se reproduire.

Remarque concernant le mâle relâché absent Batman (né en 2012) : il est le bouc le plus âgé de la vallée d’Aspe, 12 ans au moment de cette publication. La longévité potentielle de l’espèce est proche d’une vingtaine d’années, légèrement supérieure chez les femelles. L’espérance de vie se situe aux environs de 12 à 15 ans. Les vieux bouquetins entament une vie en solitaire ; est-ce le cas pour notre vétéran?

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Hors départs de la vallée ou mortalité, cela nous donne un potentiel de 57 adultes et subadultes (entre 1 et 2 ans) à observer à la date de cette publication. Je me demande où sont passées toutes les étagnes manquantes et leur progéniture.

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IV- Vidéo du groupe des boucs

J’ai filmé ce jour-là plusieurs observations qui me semblaient intéressantes sur le groupe des boucs. Voici le lien vers Vimeo (sans publicité et meilleure qualité vidéo) ou vers Youtube pour en consulter le résumé en 3 mn, mis en ligne en mars 2024 :

Vimeo : Bouquetins en vallée d’Aspe (Pyrénées)

YouTube : Bouquetins en vallée d’Aspe (Pyrénées)

Bonne lecture!

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V- Webographie

_ Parc National des Pyrénées du 19 octobre 2022 : https://www.pyrenees-parcnational.fr/fr/actualites/bienheureux-les-bouquetins-au-parc-national-des-pyrenees

_ Plan de restauration du bouquetin (Capra pyrenaica) dans les Pyrénées Françaises 2014 – 2022 : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/PNA_Bouquetin-iberique_2014-2022.pdf

_ Analyses et suivi démographique de la population de bouquetin ibérique (Capra pyrenaica) dans les Pyrénées ariégeoises depuis sa réintroduction en 2014 : https://www.parc-pyrenees-ariegeoises.fr/wp-content/uploads/2020/08/Analyses-et-suivi-d%C3%A9mographique_BQT_Ari%C3%A8ge-converti2.pdf

_ Suivi de la population du bouquetin ibérique – Parc national des Pyrénées – 2021 : https://www.pyrenees-parcnational.fr/sites/pyrenees-parcnational.fr/files/available_docs/suivi-bouquetin-parc_national_des_pyrenees.pdf

_ Eguía, S. y Martínez García, J.A. (2021) Censo de Cabra montés en núcleos principales de la Región de Murcia. Dirección General de Medio Natural. Consejería de Agua, Agricultura, Ganadería, Pesca y Medio Ambiente. Comunidad Autónoma de la Región de Murcia. Inf. Inéd. : https://cazaypesca.carm.es/documents/537485/539806/CENSOCABRA2021_web.pdf/7f69a744-5dd1-4a1e-a5c9-5b08986f64de

_ La Cabra Montes (Capra pyrenaica) en el Parque Natural de las sierras de Cazorla, Segura y las Villas – Paulino Fandos : https://www.paulinofandos.com/web/pdf_separatas/25lacabramontes.pdf

_ La gestion en ecosistemas andaluces – Ecosistemas de Mantana – Capitulo 26 : Gestion de la Cabra Montés – pp 466-469 : https://www.researchgate.net/publication/266160427_Gestion_de_la_Cabra_Montes

_ Le portail technique de l’OFB – Fiche N°7 : Taille des Groupes (TGp) : https://professionnels.ofb.fr/sites/default/files/pdf/documentation/FT-ICE-2015_07-TGp.pdf

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