On l’identifie facilement à sa pupille horizontale avec l’iris orange à rouge cuivré, légèrement strié de noir.
Le Crapaud épineux (Bufo spinosus) est un Anoure que l’on rencontre couramment les belles nuits d’été. Derrière son aspect parfois peu engageant et sa mauvaise réputation, se cache un animal très utile. La Nature est bien faite ; elle a tout prévu et chaque espèce a naturellement sa place dans la biodiversité.
Il n’a été élevé au rang d’espèce à part entière que depuis 2013, afin de le différencier du Crapaud commun (Bufo bufo) dont il a été longtemps considéré comme une sous-espèce. Cette différenciation a pu être officialisée avec les progrès de la génétique.
En France, on le trouve au Sud d’une ligne Basse-Normandie (Rouen) – Alpes Maritimes. Le Crapaud commun en occupe la partie nord, avec une zone de transition où les deux espèces sont présentes. L’hybridation est possible mais elle reste très limitée ; j’explique pourquoi un peu plus loin.
Voici en quelques lignes les informations qui me semblent utiles pour mieux le connaître :
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I- Description générale du Crapaud épineux
Tout d’abord, c’est le plus grand des crapauds d’Europe.
Une femelle, imposante. Sur sa lèvre supérieure, un reste de repas (insecte).
La coloration générale de celui-ci tend vers le gris,
vers le jaunâtre.
Celui-ci a des tâches brunes.
Sa couleur générale, plutôt unie, est très variable et ne peut être un critère de différentiation avec d’autres espèces de crapauds. Elle va le plus souvent du marron crème au marron foncé mais il existe bien d’autres nuances, vers le gris, le verdâtre, etc.
Ce qui surprend au premier abord, c’est l’aspect nettement pustuleux de sa peau. L’abondance de ces pustules est à l’origine de son nom.
A l’arrière des yeux, les deux glandes parotoïdes divergentes sont bien visibles.
Ces pustules sont en fait des glandes ; certaines lui permettent de sécréter un mucus pour conserver sa peau humide et d’autres un venin à la fois antibiotique et antiseptique pour lui.
Sur ses épaules, il dispose de deux glandes parotoïdes bien proéminentes qui sécrètent également du venin.
Au premier-plan, l’une des deux glandes parotoïdes.
Ce venin ne traverse pas la peau mais il pénètre l’organisme de certains de ses prédateurs par l’intermédiaire des muqueuses (bouche, yeux). Il n’y a pas de danger à manipuler un crapaud mais il ne faut pas mettre ensuite ses doigts au contact des muqueuses.
Manipulé, il peut également relâcher de l’urine par réaction de défense. Le mieux est de le laisser tranquille!
Les jeunes chiens généralement peu méfiants qui voudraient jouer avec lui sont particulièrement exposés à un empoisonnement. L’issue peut être dans certains cas fatale car il n’y a pas de contrepoison.
Ce venin se présente sous la forme d’un liquide épais. Le crapaud n’a aucun moyen de l’injecter mais il n’a pas besoin d’être ingéré pour agir. Ce venin est éjecté sous l’effet de la pression des mâchoires du chien sur les glandes. Le venin pénètre ensuite dans le sang par contact avec la muqueuse de la bouche et agit sur le cœur et le système nerveux. La gravité dépend de la quantité de venin libérée et du poids du chien.
Un mâle je pense, mais sans pouvoir l’affirmer ; la croissance n’est pas terminée.
A la période des amours, on reconnaît à coup sûr le mâle à la présence des callosités nuptiales noirâtres sur trois des quatre doigts de ses pattes avant ; elles lui permettent de maintenir la femelle pendant l’accouplement.
Les femelles sont imposantes.
La femelle est nettement plus grosse que le mâle et elle peut atteindre une quinzaine de centimètres de longueur, du cloaque au museau (une dizaine pour le mâle).
Sur une route de campagne – Un mâle attentif redressé sur ses pattes avant, munies de quatre doigts non palmés.
Les pattes arrière ont cinq orteils presque entièrement palmés.
Le mâle, dépourvu de sac vocal externe, peut quand même coasser à la période des amours mais la portée du chant est faible. La femelle est muette.
Leur longévité peut aller jusqu’à une dizaine d’années environ, quand tout se passe bien.
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II- Le mode de vie du Crapaud épineux
Tranquille!
Dérangé!
Il commence à s’activer au crépuscule pour se nourrir jusqu’à l’aube ; il voit très bien la nuit. Il chasse à l’affût, parfaitement immobile, et repère ses proies à leur mouvement.
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En déplacement.
Ses pattes avant sont courtes et il préfère marcher pour se déplacer, sauf quand il est dérangé où il fait alors des bonds.
Il consomme essentiellement des vers de terre et des insectes, qu’il capture avec sa langue gluante. Mais il se rend aussi très utile au jardin en consommant des limaces, escargots et autres bestioles qui n’y sont pas les bienvenues. Il ne boit pas ; l’eau dont il a besoin est absorbée par la peau.
Position d’attente pour chasser.
Dans la journée, il se repose à l’abri dans un trou, un regard, sous une pierre ou un tas de bois, …, tout endroit sombre où il trouvera fraîcheur et tranquillité.
Lorsqu’il se sent menacé, il se relève sur ses quatre pattes bien tendues et se gonfle pour impressionner.
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III- L’habitat du Crapaud épineux
On le trouve aussi bien en ville qu’à la campagne, dans les parcs, les bois et les jardins. Il fréquente tout type de milieu frais et arboré, de la plaine jusqu’à la limite de la forêt de l’étage subalpin (2 000 m d’altitude environ). En fait, il évite surtout les endroits secs.
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IV- Le mode de reproduction du Crapaud épineux
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Le Crapaud épineux est un Anoure terrestre. Il ne va dans l’eau que pour se reproduire, en se déplaçant de son lieu d’hivernage (terrier de rongeurs, tas de bois, etc.) à celui qui l’a vu naître.
La maturité sexuelle est variable selon les sources consultées. Au plus tôt, elle serait atteinte à 3 ans pour les mâles et 4 ans pour les femelles.
Tôt en saison (début février), ils se dirigent vers les plans d’eau (mares, étangs) situés la plupart du temps dans des milieux semi-ouverts, par dizaines, centaines et même parfois plus en certains endroits bien protégés. Pendant cette migration, il arrive qu’un mâle retienne déjà sa place en se faisant transporter par une femelle.
L’accouplement est long! La compétition est rude chez les mâles car ils sont bien plus nombreux. Ils se mettent à plusieurs pour convoiter les faveurs de la dulcinée qui, parfois, n’en réchappe pas, noyée sous le poids du ou des prétendants.
La ponte est facile à reconnaître, sous forme de deux longs chapelets d’œufs disposés en quinconce (un cordon par ovaire). Les têtards naissent au bout de deux à trois semaines en fonction de la température de l’eau. Pendant leur métamorphose, ils sont petits et de couleur noire.
Douze à seize semaines plus tard selon les conditions ambiantes, une multitude de carpelets bien dégourdis sortent de l’eau ; ils sont une proie facile pour certains prédateurs.
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V- Confusions possibles du Crapaud épineux
Dans la zone de transition, on peut le confondre avec le Crapaud commun (Bufo bufo). Il est plus imposant et possède plus de pustules que ce dernier et ses glandes parotoïdes sont plus volumineuses mais cela reste cependant assez suggestif. La disposition des glandes parotoïdes est plus parlante : divergentes chez l’épineux, parallèles chez le commun.
Une étude parue en 2020 (référencée dans la bibliographie) et menée par le CNRS a mis en évidence que l’hybridation entre les deux espèces était possible mais limitée dans une petite partie de la zone de transition, située dans le sud du département de l’Isère.
Isolés en Espagne (pour le Crapaud épineux) et plus à l’Est (pour le Crapaud commun) pendant la dernière glaciation (environ 120 000 à 10 000 ans), ces deux crapauds ont depuis recolonisé la France chacun de son côté jusqu’à une zone de contact. Les deux espèces, bien que proches, ont des chromosomes sexuels différents : XY (comme chez les mammifères) pour l’épineux, ZW (comme chez les oiseaux) pour le commun. Malgré ces différences fondamentales, ils parviennent encore à s’hybrider mais ces échanges sont peu nombreux.
On peut aussi le confondre avec le Crapaud calamite (Epidalea calamita) qui possède également une pupille horizontale mais son iris est jaune. Le calamite possède en plus une ligne dorsale de couleur claire.
29 décembre – Une ponte de Crapaud calamite.
Sur un biotope où le Crapaud épineux et le Crapaud calamite sont présents, on peut confondre leurs pontes qui sont toutes les deux sous forme de deux cordons gélatineux avec des œufs de tailles équivalentes :
_ les œufs de l’épineux (et du commun) sont disposés en quinconce sur 2 à 4 rangées et les cordons sont généralement fixés à la végétation aquatique,
_ les œufs du calamite sont disposés sur une ou deux rangées et les cordons sont généralement déposés au fond, dans quelques centimètres d’eau.
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VI- Les dangers pour le Crapaud épineux
Vu ainsi, il me paraît même sympathique.
Le Crapaud épineux est une espèce protégée depuis l’arrêté interministériel du 24 avril 1979 fixant la liste des amphibiens et reptiles protégés sur l’ensemble du territoire national.
Il a peu de prédateurs naturels, à cause de sa toxicité. Les plus connus sont la Couleuvre helvétique (Natrix helvetica) qui est immunisée contre son venin, le Héron cendré (Ardea cinerea) et le Hérisson européen (Erinaceus europaeus) qui font attention.
En plus du préjudice causé par la diminution des zones humides de son habitat, la présence d’un réseau routier entre son lieu d’hivernage et son lieu de ponte est un piège mortel. Le trafic routier augmente partout et les dégâts sont parfois considérables. Avec sa démarche pataude, le Crapaud met trop de temps à traverser.
Depuis quelques années, certaines associations mettent en place des dispositifs pour sécuriser cette traversée, avec celles des grenouilles et autres amphibiens.
Vic-en-Bigorre – Panneau préventif qui concerne en fait tous les amphibiens.
C’est le cas dans ma région avec l’opération de protection des amphibiens menée chaque année depuis 2012 par le lycée agricole et forestier Jean-Monnet de Vic-en-Bigorre dans les Hautes-Pyrénées. Des filets linéaires sont mis en place le long de la départementale D 61, de mi-décembre à mi-mars environ. Les amphibiens sont recueillis dans des seaux placés dans le sol tous les 10 mètres et déplacés tous les jours de l’autre côté de la route (lien vers l’information dans la bibliographie).
Panneau de présentation de la barrière à amphibiens.
La barrière, parallèle à la route.
L’un des seaux de récupération des amphibiens.
La barrière, vue de l’autre extrémité.
Pour les nouveaux projets de réseaux routiers, l’impact environnemental est en principe pris en compte avec la construction de corridors écologiques sous forme de tunnels aménagés et autres dispositifs.
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VII- Webographie
_ Publication du CNRS – Des crapauds qui s’hybrident avec des chromosomes sexuels différents (07 octobre 2020) : www.inee.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/des-crapauds-qui-shybrident-avec-des-chromosomes-sexuels-differents#:~:text=Le%20crapaud%20%C3%A9pineux%20d%C3%A9termine%20le,des%20%C3%A9changes%20g%C3%A9n%C3%A9tiques%20restent%20limit%C3%A9s.
_ Centre antipoison animal – CAPAE Ouest : www.centre-antipoison-animal.com/crapaud.html
_ La Dépêche du 11 février 2021 – Nouvelle campagne de protection des amphibiens à Vic-en-Bigorre : www.ladepeche.fr/2021/02/11/nouvelle-campagne-de-protection-des-amphibiens-9366516.php
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