Un brocard en velours au gagnage dans une prairie (23 février).
Une Chevrette curieuse (30 janvier).
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Cette publication, bien illustrée par des photos personnelles, aborde pas mal de sujets sur le Chevreuil (Capreolus capreolus) et classés en paragraphes : les termes courants utilisés pour le définir, puis sa description, son mode de vie, des informations sur les faons, les différentes formes de bois des brocards, leurs classes d’âge, etc.
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I- Présentation du chevreuil
Le chevreuil (Capreolus capreolus) est un animal que j’aime pour son élégance et le Béarn est une région où il est bien représenté. Le biotope s’y prête, mélange de terres à polyculture, de prairies et de forêts de chênes, de châtaigniers et d’acacias. Il y prospère tout en étant régulé comme partout ailleurs par des plans de chasse.
Un chevreuil mature, avec un cou court et massif (01 février).
Plutôt discret en hiver, le chevreuil profite du renouveau printanier dès que les grues entament leur migration retour. On le voit plus souvent dans les prairies et dans les champs de maïs ramassé, où il se repaisse d’herbe tendre. La période de chasse arrive à sa fin et il devient moins méfiant.
Le chevreuil est régulièrement appelé, à tord bien sûr, la biche. J’ai essayé de corriger cette erreur auprès de pas mal d’amis mais cela reste ancré dans les mœurs. On ne peut pourtant pas confondre ces deux espèces de cervidés, car leur morphologie est bien différente. En lisant ces lignes, vous apprendrez à mieux le connaître.
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II- Quelques termes courants pour définir le chevreuil
Une Chevrette et un Brocard adultes. A droite un jeune brocard, svelte, aux velours naissants. Ces velours sont fins, bien séparés et j’hésite au vu de sa corpulence : est-ce le chevrillard qui vit encore avec sa mère, bientôt daguet? (28 janvier).
L’appellation « chevreuil » s’applique indifféremment au mâle et à la femelle. On nomme « brocard » le mâle chevreuil ; la femelle est la « chevrette ». Le jeune s’appelle le « faon » jusqu’à l’âge de 6 mois puis le « chevrillard » de 6 à 12 mois, et cela quel que soit le sexe.
Seul les mâles adultes portent des bois. Caducs, ils tombent tous les ans à l’automne!
Chez le faon mâle, deux protubérances osseuses commencent à pousser au-delà du troisième mois sur son os frontal, les futurs pivots.
A un an révolu, le chevrillard mâle devient un brocard pour le restant de sa vie : il porte sur les pivots deux petites dagues fourchues ou non. Ces tout premiers bois sont de petite taille, plus petits que les oreilles.
A partir de leur deuxième repousse (brocard sur sa troisième année), chaque bois s’orne à sa partie supérieure d’une ou deux nouvelles pointes. Le nombre de ces pointes, que l’on appelle indifféremment « cor » ou « andouiller », déterminent un Quatre cors ou un Six cors, et cela indépendamment de l’âge. Le nombre de cors n’augmente plus par la suite, sauf quelques rares cas de Huit cors, un phénomène que je n’ai pas encore personnellement observé.
La meule est le renflement situé à la base des bois, en forme d’anneau et portant de nombreuses excroissances appelées pierrures. Elle fait le lien avec le pivot déjà cité.
La tige centrale entre la meule et la pointe ultime est le merrain, qui a des perlures ressemblant à des gouttelettes ; on dit que le bois est « perlé ».
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III- Description du chevreuil
La belle prestance d’un brocard adulte « particulier » (24 avril).
Le chevreuil adulte pèse entre 15 et 30 kg en moyenne, selon les territoires et la densité de population (à âge égal et dans de bonnes conditions de nourriture, la femelle est un peu plus petite et plus légère de 2 à 3 kg). En cas de surpopulation, la corpulence des animaux diminue, ainsi que la résistance aux maladies.
En comparaison, le cerf élaphe adulte pèse entre 160 et 250 kg et la biche, entre 90 et 150 kg : il est donc difficile de confondre un cerf avec un chevreuil, même de loin. Ce poids n’est qu’un ordre d’idée représentant des fourchettes mini/maxi et les chiffres dépendent des sources consultées.
Pour le chevreuil et le cerf élaphe, la taille est fortement influencée par l’habitat. Elle augmente des Pyrénées vers l’est de la France et on trouve les plus grands spécimens en Lorraine, dans le Jura et dans les Ardennes.
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Le miroir bien hérissé, ce brocard n’est pas content! (01 février).
Après la chute des bois à l’automne, un moyen de différencier les mâles des femelles est la tâche claire et érectile située sur le fessier, que l’on appelle le miroir : en forme de haricot (partie courbe vers le haut) chez le brocard et en forme d’As de pique chez la chevrette. Ce miroir (appelé aussi roze) est blanc en hiver et jaunâtre en été. Quand le chevreuil est inquiété, il hérisse les poils de ce miroir et avertit ainsi les congénères d’un danger potentiel.
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Chevrette, brocard et chevrette. La brosse vulvaire des femelles se voit de loin quand elles sont de profil. Cela permet de les identifier facilement, quand les mâles ont perdu leurs bois (01 février).
La chevrette possède aussi à la base du miroir une fausse queue constituée de long poils clairs, la brosse vulvaire, bien visible de profil. Le chevreuil n’a pas de queue, mais on devine chez les deux sexes, au-dessus de l’anus, un espèce de petit appendice atrophié.
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Pas de pinceau pénien visible, mais absence de la brosse vulvaire : c’est un brocard dont les velours commencent tout juste à pousser (26 décembre).
Confirmation pour la photo précédente : il s’agit bien d’un mâle, à l’apparence plutôt jeune. Son pinceau pénien est peu développé (26 décembre).
Sur cet adulte, le pinceau pénien est évident (23 février).
Pour le brocard, on peut parfois repérer de profil son pinceau pénien.
L’aspect général de l’animal, vu de loin, est aussi une indication : pour le brocard, la partie antérieure de son corps est plus large que la partie postérieure ; chez la chevrette, au contraire, le centre de gravité est placé vers l’arrière-train.
On voit bien ici la différence de forme du miroir entre les chevrettes (avec la présence de la brosse vulvaire) et les brocards (20 mars).
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Le chevreuil a une vue surtout basée sur la perception des mouvements, mais il se rattrape avec un excellent odorat et une ouïe fine. A la moindre alerte, il détale prestement. Sa morphologie est optimisée pour le saut et la course rapide, mais il peut s’épuiser rapidement.
La fuite d’un couple, miroir étalé et hérissé (23 février).
Chez ce même couple adulte, la femelle est un peu plus petite que le mâle et on voit bien de profil sa brosse vulvaire (23 février).
Dérangé, il émet pendant la fuite (mâle et femelle) une série d’aboiements rauques ressemblant à ceux d’un chien ; c’est un signe d’inquiétude ou de colère! En sécurité dans le sous-bois et s’il n’a toujours pas identifié ce qui l’a dérangé, il répète ses aboiements à plusieurs reprises avant de s’éloigner définitivement.
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Un brocard à la « triste mine ». C’est un adulte. Il mue alors qu’il est encore avec ses velours, bien fournis. (18 février).
Question mue, ce n’est pas mieux chez les jeunes chevrettes (03 mars).
Le pelage du chevreuil mue deux fois par an : à l’automne où son poil vire progressivement au gris ou au brun, bien épais ; puis au printemps où il devient alors d’une belle couleur roux vif, ras. La mue de printemps est brutale et la perte des poils lui donne vraiment une triste mine. La mue est plus précoce chez les jeunes. La chute des poils débute par la tête, le cou puis les membres et enfin le tronc.
La mue d’automne est bien plus discrète, progressive et elle passe quasiment inaperçue.
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Sous le soleil matinal – Le début de la repousse des bois d’un brocard adulte. Le velours a été accidentellement touché et saigne ; le futur bois aura probablement une anomalie, à l’origine ce que l’on appelle une « tête bizarde » (26 décembre).
Les bois perdus en octobre-novembre recommencent aussitôt à pousser durant l’hiver. Pendant cette repousse, ils sont recouverts d’une peau appelée velours qui protège et nourrit les bois pendant leur croissance.
Les velours d’un adulte (23 février) .
Quand celle-ci s’achève, l’irrigation du velours cesse et ce dernier se dessèche. Il va alors tomber en lambeaux que le chevreuil élimine en se frottant sur les écorces des arbres tout en occasionnant quelques dégâts, de mars à avril suivant les sujets.
Les vieux brocards perdent leurs bois les premiers et les nouveaux bois seront alors opérationnels avant ceux des plus jeunes ; ils ont ainsi une longueur d’avance pour défendre leur territoire face aux générations « montantes ».
La mue n’est pas encore terminée chez ce mâle bientôt mature (14 mai).
Les brocards matures muent plus tard que les jeunes, parfois courant mai.
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On aperçoit la tache claire de la « serviette » en deux parties sur le poitrail (23 février).
Quelques sujets adultes des deux sexes portent en hiver une serviette, tache claire et ovale sur le poitrail à la base du cou et parfois en deux parties. Elle n’a aucun rapport avec leur âge.
La maturité sexuelle des chevreuils commence pour les deux sexes au début de la seconde année ; elle est également conditionnée par son poids pour la femelle.
Le chevreuil, contrairement au cerf, boit très peu. Quand cela lui arrive, il avance son museau à la limite du contact avec l’eau et effectue des petits mouvements avec sa mâchoire inférieure, sans sortir sa langue. Il boit avec beaucoup de délicatesse et donne l’impression de ne pas toucher l’eau. Sa langue n’apparaît qu’à la fin, quand l’animal relève la tête et la passe sur son museau mouillé.
En fait, il se désaltère essentiellement grâce à la rosée matinale mais lors d’un épisode de sécheresse estivale, cela n’est pas suffisant et il m’arrive alors de voir un chevreuil boire.
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IV- Quelques informations sur les faons de chevreuils
Les faons naissent entre la mi-mai et la mi-juin pour la plupart ; ils sont tachetés pendant les deux premiers mois de leur vie. Les taches sont alignées sur le dos et sur les flancs contrairement à celles du faon de cerf qui sont éparses. Les taches blanches s’estompent et disparaissent en octobre au plus tard, au moment où le faon devenu un chevrillard mue pour prendre son pelage d’hiver.
Le faon de la biche, avec sa robe semée de taches disparates et sa petite queue (24 août),
… et le faon de la chevrette, avec les taches de sa robe alignées (01 septembre).
Lorsqu’ils naissent, les faons n’ont pas d’odeur corporelle dans les premières semaines de leur vie, particularité qui les protège de certains prédateurs comme les chiens errants et les renards. Une heure après la naissance, les jeunes se tiennent déjà debout sur leurs pattes, puis ils font leurs premiers pas.
Les portées sont de deux petits en moyenne (la parité mâle / femelle n’est pas systématique), plus rarement trois. Le nombre est conditionné par le poids de la femelle ; plus elle est lourde et plus elle a des chances de mettre bas un nombre conséquent de petits, mais un poids autour de 20 kg minimum est nécessaire.
La taille de la portée est généralement de 2 faons (20 à 22 kg = 1 faon, 22 à 25 kg = 2 faons) . Elle peut atteindre 3 faons dans les milieux particulièrement favorables.
Une chevrette et ses deux chevrillards femelles (21 novembre).
Le sevrage est achevé en octobre-novembre mais les chevrillards restent avec la mère qui leur apprend tout ce qui est nécessaire à leur survie, où et comment bien se nourrir mais aussi à identifier et éviter les risques. Au moindre danger, la mère décampe, suivie méticuleusement par sa marmaille.
Leur éducation est terminée à l’approche de la mise bas suivante. Ils sont alors définitivement délaissés, généralement la première quinzaine d’avril. La mère s’éloigne dans un endroit tranquille et propice pour les prochaines naissances. Ce sont ses vacances, qui ne durent pas longtemps ; elle est en effet occupée onze mois environ sur douze par sa progéniture.
Les jeunes, abandonnés à leur sort, ne comprennent pas de suite et vont un peu errer sur ce territoire qui les a vu grandir, à la recherche de cette mère « indigne ». Quelques jours plus tard, ils finiront par quitter les lieux et se séparer pour s’installer sur le prochain territoire disponible. Ils ont un an et sont maintenant adultes.
La mortalité est importante chez les faons : par prédation (chiens errants, renards, sangliers …), accidentellement (réseau routier, noyade …), ou tout autre raison.
La période des foins et des moissons est dramatique pour eux. En effet, le réflexe naturel du faon encore très jeune est de se tapir quand il y a danger! Il est alors à la merci de la faucheuse ou de la moissonneuse qui ne peut pas le voir et l’accident est fatal.
Ils sont parfois infestés par les tiques, comme d’ailleurs leurs parents. La mortalité peut aller jusqu’à 90 % à la fin du premier hiver.
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V- Le mode de vie du chevreuil
Le chevreuil est sédentaire et reste toute l’année sur le même territoire, d’une superficie d’une vingtaine d’hectares environ mais variable suivant les ressources en nourriture.
Ce groupe formé pour la mauvaise saison est sur le point de se séparer. Les trois brocards sont des Six cors d’âge adulte à mature. Deux autres chevrettes sont hors champ (03 février).
Un brocard et 4 chevrettes dont 2 jeunes, avec la gelée matinale (22 janvier).
Il a passé l’hiver en petits groupes familiaux constitués après la fin du rut, à l’automne et pendant l’hiver. Courant février à l’approche du printemps, ces petits groupes se séparent.
Le brocard redevient solitaire et retrouve son comportement territorial jusqu’à la fin août. Il marque son domaine en laissant sur les troncs d’arbre son empreinte olfactive, en frottant les glandes situées à la base de ses bois.
Un groupe au gagnage en hiver, après le coucher du soleil – Un brocard adulte avec sa serviette, un jeune brocard avec une serviette et des velours naissants, une chevrette (deviné à son allure générale) et un autre jeune brocard (non coiffé mais présence d’un pinceau pénien) – (08 février).
Le chevreuil alterne les phases d’activité et de repos dans la journée, mais il va de préférence au gagnage au lever du jour et au crépuscule. Il s’approche facilement des habitations les jours de mauvais temps. Il est également actif la nuit.
Quand il fait partie d’un groupe, le brocard sort à découvert le dernier car il est naturellement méfiant. Cette méfiance est encore plus marquée chez les brocards âgés, qui restent facilement solitaires et discrets pendant une bonne partie de l’année.
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Brocard sur sa « couchette » dans un champ de luzerne, un soir d’été.
Avant de se reposer, le chevreuil tourne en rond tout en grattant le sol avec ses pattes avant, pour en dégager la végétation ; puis il se couche en boule. Cette « couchette » est une indication de sa présence.
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Brocard adulte attentif, dans un champ de maïs ramassé (16 janvier).
L’une des attitudes typiques d’un autre brocard curieux, en bordure d’un bois (23 février).
Il est d’un naturel curieux. Si quelque chose l’intrigue, le chevreuil s’approche prudemment par petites étapes ; à l’arrêt, il balance sa tête de droite à gauche pour tenter d’identifier ce qui l’a interpelé. S’il ne vous a pas repéré, il y a quelques opportunités pour faire de beaux clichés de proximité.
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VI- Les différentes formes de bois de brocard
Les bois sont essentiellement un indicateur de santé du brocard. Leurs formes, à partir d’un brocard sur sa troisième année, sont indépendantes de l’âge et ne peuvent pas aider à le déterminer.
6-1 _ Les formes les plus classiques de bois pour le brocard
Ce sont le daguet (deux dagues), le Quatre cors (avec deux andouillers antérieurs), et le Six cors (avec deux andouillers supplémentaires, postérieurs). Le terme de « daguet » est uniquement réservé au brocard sur sa 2ème année. L’andouiller le plus bas est toujours dirigé vers l’avant.
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6-2_ Il existe aussi des cas de bois de brocard moins classiques
_ Un brocard adulte (plus de deux ans) qui porte des bois dépourvus d’andouillers est appelé un brocard « assassin », quel que soit son âge. En effet, lors de combats à la période du rut, aucune garde ne vient arrêter les deux pointes qui peuvent se planter profondément dans les flancs ou le crâne de l’adversaire.
Sur un individu que j’ai suivi, cette forme de bois s’est renouvelée sur au moins deux années consécutives.
Brocard « assassin » (23 juillet) .
Un autre brocard adulte avec des bois en forme de lyre dépourvus d’andouillers, que l’on peut qualifier aussi « d’assassin ». C’est un territorial : il s’est battu et son front est barré d’une estafilade. On devine, au-dessus des perlures, l’empreinte discrète de deux andouillers antérieurs avortés et noyés dans le bois (24 avril).
_ Un brocard à la tête bizarde est un brocard dont les bois présentent des anomalies : ils sont irréguliers ou mal formés. Les formes sont vraiment très variées. Certaines anomalies sont d’origine accidentelle et ne sont pas reproduites l’année suivante. Dans l’exemple qui suit, ce brocard a peut-être eu le velours fendu au début de la pousse.
Brocard adulte à la tête bizarde ; la photo parle d’elle-même (01 juillet).
Le même brocard ; son bois effilé est une arme redoutable (06 juillet).
Pendant le rut – Le « Quatre cors » va s’incliner devant le « Tête bizarde » (29 juillet).
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_ Le Huit cors est un phénomène rare, que je n’ai pas encore observé.
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VII- Peut-on appréhender l’âge d’une chevrette ou d’un brocard?
On peut arriver à déterminer l’âge des chevreuils mâle et femelle par l’examen de leur denture ; cela ne peut se faire que sur un individu capturé ou prélevé.
Sur un chevreuil en liberté, il n’y a pas de méthode fiable ; on ne dispose que de son apparence qui est un critère très empirique :
_ La chevrette au début de sa deuxième année est encore menue. Au cours de l’été, son apparence devient identique à celle des femelles plus âgées ; celles d’entres elles qui ont atteint le poids suffisant demandé par la Nature pour être fécondables, participent au rut. Seule une vieille chevrette pourrait m’interpeler, mais je n’en rencontre que rarement dans mon environnement.
_ Sur le brocard, on est tenté d’obtenir une réponse par l’observation de son allure générale mais cela reste très approximatif ; les erreurs sont fréquentes. Cette détermination demande de l’expérience et une très bonne connaissance d’une population donnée ; malgré cela, même les spécialistes se trompent! On arrive plus facilement à parler en classes d’âge.
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VIII- L’âge empirique d’un brocard par son allure générale
Par curiosité, j’ai essayé de m’en faire une idée à partir de mes photos ; eh bien, j’ai eu beaucoup de mal! L’analyse reste arbitraire car les photos dont je dispose n’ont pas été prises dans ce but : elles ne sont pas suffisamment nombreuses, ne couvrent pas toute la période de la vie d’un individu, ne couvrent pas tous les cas d’individus, ne sont pas prises aux mêmes moments, ne sont pas toujours explicites, etc. De toute façon, le résultat ne serait valable que pour un biotope donné à un moment donné. Bref, ce n’est pas simple!
8-1_ mes classes d’âge empiriques du brocard
A défaut d’existence d’une classification officielle pour les animaux, j’ai essayé de classifié les brocards en quatre groupes d’âge : jeune, adulte, mature et âgé.
J’ai résumé mes appréciations dans le tableau qui suit : il permet de se faire sa propre idée, qui dépend des critères que l’on retient :
_ dans les faits, j’ai de sérieuses difficultés à mettre des limites entre les groupes d’âge « adulte », « mature » et « âgé »,
_ pour réduire les erreurs d’appréciation, il serait plus simple de rassembler en un seul groupe les « adultes » et les « matures » ; on pourrait, bien sûr, me dire qu’un adulte peut être jeune ou mature,
_ L’âge où on peut considérer qu’un brocard est « âgé » dépend fortement de son passé avec les conditions de vie qu’il a connues et de sa génétique. Je n’ai pas d’élément fiable pour indiquer une frontière entre un brocard mature qui a commencé à régresser et un brocard âgé qui décline.
Dans la littérature, un chevreuil âgé de 7 à 8 ans est considéré comme étant vieux. Son espérance de vie maximale dans la Nature est de dix à douze ans.
Je n’ai jamais observé de brocard dont la vieillesse ne faisait pas de doute ; on ne les laisse pas vieillir en paix.
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8-2_ Le chevrillard mâle
8-2-1_ Certains chevrillards mâles présentent deux cycles de bois
Dans ce cas-là, un petit cornet osseux (pas toujours évident à observer) pousse en novembre sur le pivot du faon qui vient de devenir chevrillard et émerge au-dessus des poils du front ; on l’appelle une broche. Ces broches, qui mesureront 2 à 4 cm environ, vont tomber en janvier.
Le premier cycle des bois véritables commence aussitôt après, sous velours ET avec des meules. Il se terminera environ quatre mois plus tard, courant mai selon les individus et alors que le chevrillard a quitté sa mère et est devenu adulte. Il est un brocard sur la deuxième année de sa vie et on dit qu’il porte sa première tête (ses premiers bois).
Un chevrillard mâle en avance sur sa croissance, de profil : ses pivots sont surmontés de deux petits cônes osseux grisâtres, les broches (21 novembre).
Le même chevrillard de face : ses petites broches ont attiré mon attention (21 novembre).
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8-2-2_ Pour les autres chevrillards mâles, les bois poussent en un seul cycle
Ces bois, appelés des dagues, n’ont pas de meules. Le début de la croissance sous la peau du front est visible dès fin août-début septembre, au début du quatrième mois. Elle a lieu sous velours, avec des poils longs et sombres en partie sommitale. Vers la mi-janvier, le chevrillard pert ses velours, parfois aidé par sa mère qui lui en mange les lambeaux. Les pointes apparaissent, d’une hauteur parfois inégale et variant entre cinq et dix centimètres environ. Dans ce cas-là, le chevrillard a des bois neufs avant les brocards les plus âgés qui sont encore en velours pour quelques jours encore.
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8-3_ Le brocard sur sa 2ème année (ou 1ère tête)
Il est svelte, l’œil vif, avec un cou long et mince. Sa tête porte deux dagues qui ne dépasseront pas la longueur des oreilles. On l’appelle un Daguet. Sur les meilleurs sujets, la dague peut être fourchue avec l’apparition de l’andouiller antérieur.
A gauche, un jeune adulte (le velours des anciens est à cette date-là plus avancé). Au centre, ce brocard avec ses petites dagues de longueurs inégales est intéressant : c’est un daguet qui a encore ses premiers bois, qui vont tomber sous peu. J’estime son âge à 21 mois environ. A droite, une chevrette, bien reconnaissable à sa brosse vulvaire ; elle est peut-être la mère du daguet (25 février).
Un tout jeune brocard sur sa 2ème année. Sa coiffe est constituée d’une petite pointe (où n’apparaît pas de meule) et d’un bois avec l’andouiller antérieur, avec une meule (24 avril).
Les daguets (et les jeunes chevrettes) gardent encore le comportement remuant et insouciant du chevrillard. A l’occasion, ils continuent à jouer.
Le daguet, jouant avec l’adulte. Il apprend le « métier » pour devenir territorial.
Le daguet précédent n’hésite pas à provoquer ce brocard adulte, un « Assassin » qui est dans sa période territoriale. Ce dernier, ne voyant pas dans ce jeune de danger potentiel, s’est prêté au jeu.
La mère était encore à proximité. Ce jeune daguet, après l’avoir quittée quelques jours plus tard, va passer plusieurs semaines en compagnie du brocard assassin et je le perdrai ensuite de vue.
Ce daguet dans un champ de maïs, avec son pelage roux estival, n’a que deux dagues minuscules. Elles ressortent au-dessus des pivots recouverts de poils plus clairs. Il est en retard (05 juin).
Ce Daguet a ses deux dagues pourvues des meules. De très légères gouttières apparaissent, avec les ébauches de quelques rares perlures. Je ne l’ai pas vu à découvert et j’ai hésité pour le considérer comme un « deuxième tête » dont les bois sont en retard pour son âge (17 juillet).
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8-4_ Le brocard sur sa troisième année (2ème tête) est adulte
Le cou et son allure générale sont moins svelte, sans être massif. Le bois est déjà creusé de gouttières. Chaque bois porte deux cors (andouiller avant) et parfois un troisième cors plus ou moins développé (andouiller arrière).
Aussi, un brocard de deuxième tête peut ne posséder que 2 simples dagues si sa croissance est en retard, mais le terme « daguet » reste réservé uniquement aux « premières têtes ».
Un Six cors adulte avec une jolie tête fine ; son allure générale n’est pas encore massive. La mue du pelage est en cours (17 avril).
Un quatre Cors adulte et territorial, au regard vif. Son andouiller postérieur est remplacé par une flexure (13 juin).
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8-5_ Le brocard sur sa 4ème et 5ème année (3ème tête et 4ème tête)
Il a un cou épaissi et la masse du corps se porte sur l’avant. Il est massif. Les bois sont jolis, ne sont ni épais, ni encore bien perlés et ils ont chacun trois cors bien marqués (mais ce n’est pas systématique).
Un joli Six cors adulte territorial – Les bois sont déjà complétement dépouillés de leur velours et la mue du poil commence à peine (22 mars).
Un Quatre cors adulte, avec quelques lambeaux de velours encore accrochés et un début de mue au cou (25 mars).
Un joli Quatre cors adulte massif avec un cou épais, des bois symétriques et un peu particuliers. Les meules qui se touchent (24 juillet).
Un Six cors adulte, avec des gouttières déjà très prononcées et des perlures bien présentes (26 juillet).
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8-6_ Le brocard entre 5 et 7 ans (5ème et 6ème tête)
Il devient, pour moi, mature. Il est très massif. Sa face commence à grisonner avec l’apparition progressive de « lunettes » autour des yeux. Les perlures deviennent plus abondantes, les gouttières plus profondes, les meules tendront à se rapprocher jusqu’à paraître soudées l’une à l’autre.
Ce quatre cors mature a beaucoup de perlures et des andouillers avant très développés, des meules qui se touchent. Il s’approche de la fin de la mue du pelage (28 mai).
Un Six cors mature bien perlé. Il a perdu ses velours et n’a pas commencé sa mue (25 mars).
Un Six cors mature très massif, avec les bois neufs et son nouveau pelage encore hivernal (01 avril).
Le même Six cors, de face, avec les « lunettes » bien marquées (01 avril).
Un Quatre cors mature aux bois très hauts, sans les andouillers avant. Les velours sont tombés, dégageant de grosses pierrures sur des meules qui se touchent presque. Les perlures sont très proéminentes ; la gorge commence à muer (10 avril).
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8-7_ Le brocard sur sa huitième année (7ème tête) et au delà
Il devient un brocard potentiellement âgé et la masse de ses bois commence à régresser. Sa face devient de plus en plus grisâtre et sa position s’affaisse. Il n’a plus la fierté de l’animal en possession de tous ses moyens, arrogant avec une tête bien relevée.
Ses cors raccourcissent et s’émoussent et les perlures deviennent rares. Le nombre de cors peut diminuer.
Moins armé physiquement pour survivre, il va se faire discret. Il a atteint son espérance de vie normale ; le reste sera du bonus. Un brocard qui a vieilli est un brocard qui a échappé à bien des dangers!
Un Six cors vouté aux bois longs mais qui ont régressé. Le bois de droite a la pointe arrondie et usée jusqu’en dessous de l’emplacement potentiel de l’andouiller arrière ; l’andouiller avant est réduit à une petite pointe. Le bois de gauche a ses deux andouillers antérieur et postérieur réduis à deux petites pointes ; le haut du bois est cassé et usé. Le museau est grisâtre avec des lunettes bien marquées (20 août).
Un Six cors dont les bois n’ont pas régressé mais sa face grisâtre et son manque de nervosité m’ont fait pensé qu’il était âgé (07 septembre).
Ce brocard qui fut probablement un Six cors a des bois qui ont bien régressé. Ils sont courts et usés, sans perlures. Mais il ne faut pas se fier qu’aux bois ; son allure ne présente pas de signe particulier de vieillissement et je peux me tromper (29 mai).
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IX- La population du chevreuil
Un Six cors avec des bois d’une bonne longueur, aux pointes déjà émoussées. Il me donne l’impression d’être âgé, mais il est encore massif et à l’allure arrogante (18 mars).
En France, le chevreuil est une espèce classée gibier et soumise à des plans de chasse obligatoires depuis 1978. Aujourd’hui, on estime à 1,5 million le nombre d’individus et les prélèvements par les plans de chasse de la saison 2016/2017 est de 580 000.
Aucune menace ne pèse sur l’espèce, la population augmente régulièrement.
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X- Les maladies du chevreuil
Le chevreuil est sujet à plusieurs sortes de maladies ; je ne vais pas développer le sujet dans cet article.
L’hiver dernier, j’ai observé ce brocard au gagnage et je me suis demandé ce qu’il lui était arrivé. Je n’ai pas trouvé la réponse!
Ce brocard a un œdème autour du cou dont je n’ai pas trouvé la cause. Il s’alimente normalement. Je ne le reverrai plus (04 mars).
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XI- Bibliographie
Article rédigé le 23 février 2019 à partir de mes photos, de constatations faites sur le terrain et de données trouvées sur internet, dont :
_ http://www.jyrousseau.com/le_chevr.shtml
_ http://dianehautsbosc.canalblog.com/archives/2007/07/27/5555197.html
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Mon meilleur souvenir de ce mois de février!
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