L’Alyte accoucheur dans le Béarn

L’Alyte accoucheur, le petit crapaud « souriant ».

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J’ai photographié le 26 avril dernier (altitude 325 m) un Anoure dont la couleur inhabituelle a attiré mon attention. A l’apparence verruqueuse de sa peau, ce ne pouvait pas être une grenouille et le choix était à mon avis limité. Les Crapauds épineux sont nombreux la nuit dans la prairie et autour de mon plan d’eau au moment de leur reproduction. L’été, je rencontre régulièrement d’énormes spécimens à la nuit tombée autour de la maison, qui pour moi se ressemblent tous et appartiennent à la même espèce. Celui-là, c’était dans la journée, par temps maussade. Sa petite taille et surtout sa couleur m’ont interpellé! Quelle est cette nouvelle espèce pour moi?

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I – Informations générales utiles sur les amphibiens

Une coloration inhabituelle chez mon modèle.

Les amphibiens sont des vertébrés dont la peau est nue, sans écailles. Ils ne régulent pas leur température et pondent leurs œufs dans l’eau où se développent leurs larves (têtards). La phase adulte est principalement terrestre.

Ils regroupent les Urodèles (Triton palmé, Triton marbré, Salamandre tachetée, Calotriton des Pyrénées, …) qui possèdent une queue à l’âge adulte et les Anoures, sans queue à l’âge adulte.

Parmi les Anoures, on trouve le Crapaud épineux, Crapaud commun, Crapaud calamite, Sonneur à ventre jaune, Pélobate cultripède, Pélodyte ponctué, Alyte accoucheur, Pélodyte ponctué, Rainette verte, Rainette méridionale, les grenouilles brunes du genre Rana (Grenouille agile, Grenouille rousse, Grenouille des Pyrénées) et les Grenouilles vertes. Cela fait déjà du monde!

La fécondation est interne chez les Urodèles et les œufs sont pondus individuellement, externe chez les Anoures avec une ponte en amas.

Chez les mâles des Urodèles, les grenouilles brunes ont deux petits sacs vocaux internes, les grenouilles vertes deux sacs latéraux externes (un de chaque côté du cou), les rainettes et les crapauds ont un sac vocal unique externe (sous la gorge).

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II – L’identification de mon Alyte accoucheur assez original

Pour savoir à qui j’avais affaire, j’ai d’abord procédé par élimination en passant en revue les différentes espèces d’Anoures susceptibles d’être rencontrées dans mon environnement, que je n’ai d’ailleurs pas encore toutes observées! Cette méthode n’est pas du tout scientifique et même généralement à éviter mais elle m’a cependant aidé.

J’ai retenu comme critères principaux que mon Anoure est petit à la peau verruqueuse, avec une pupille verticale assez large, presque en forme de losange ; son iris a une couleur dorée, bien marbré de noir. Le cercle du tympan est bien net.

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2-1 _ Le Crapaud épineux (Bufo spinosus)

Sa pupille est horizontale contrairement à celle de mon sujet, avec l’iris uniformément rouge cuivré ou orange, légèrement vermiculé de noir. C’est un critère suffisant pour l’écarter.

Pour information, le Crapaud épineux n’a été élevé au rang d’espèce qu’en 2013, afin de le différencier du Crapaud commun (Bufo bufo). On le trouve au sud d’une ligne Basse-Normandie (Rouen) – Alpes-Maritimes ; C’est celui que je vois régulièrement la nuit dans mon environnement. Le Crapaud commun occupe la partie nord de cette même ligne, avec bien sûr une zone de transition (pour les différencier, consulter la documentation spécifique sur ce sujet ou regarder ma publication dans les archives).

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2-2 _ Le Crapaud calamite (Bufo calamita)

Je ne l’ai jamais rencontré. Appelé aussi le Crapaud des joncs, sa pupille est elle aussi horizontale, à l’iris jaune tirant un peu sur le vert et de taille équivalente. Il a souvent une ligne jaune le long du milieu du dos. La forme de la pupille me permet de l’écarter.

Le Crapaud calamite peut dans certains cas être confondu avec un Crapaud épineux ou un Crapaud commun de petite taille.

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2-3 _ Le Sonneur à ventre jaune (Bombina variegata)

Je ne l’ai jamais rencontré. Avec son ventre et sa gorge jaune tacheté de noir, c’est un petit crapaud unique que l’on ne peut confondre. Sa pupille est en forme de cœur. Il ne ressemble pas du tout à mon sujet, sinon par la taille.

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2-4 _ Le Pélobate cultripède (Pelobates cultripes)

Je ne l’ai jamais rencontré. On retrouve quelques caractéristiques avec mon sujet comme la pupille verticale et l’iris doré. Mais il n’a pas de disque visible au niveau du tympan : ce n’est pas lui!

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2-5 _ Le Pélodyte ponctué (Pelodytes punctatus) et l’Alyte accoucheur (Alytes obstetricans)

Ce sont les deux dernières espèces susceptibles d’être présentes dans mon environnement. On peut dans certains cas les confondre et il faut tenir compte d’un ensemble de critères pour les différencier.

2-5-1 _ Les critères d’identification du Pélodyte ponctué à retenir

Je n’ai jamais observé le Pélodyte ponctué. Appelé aussi le Crapaud persillé (en relation avec ses tâches vertes sur les verrues), ces informations sont utiles pour le caractériser :

_ les mensurations sont identiques pour les deux espèces mais son museau est long et pointu ; il a l’allure svelte et élancée d’une grenouille.

_ ses  pattes postérieures sont minces et allongées.

_ la peau du dos est aussi verruqueuse, avec les plus grosses verrues alignées ; sa couleur varie du vert olive au brun, mouchetée de tâches vertes.

_ la pupille est verticale (de largeur plus restreinte que celle de l’Alyte), en forme parfois de goutte d’eau à l’envers. L’iris est doré dans sa partie supérieure et plutôt brun dans sa partie inférieure.

_ il porte lui aussi un disque au niveau du tympan, mais il est difficile à distinguer.

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2-5-2 _ L’Alyte accoucheur (Alytes obstetricans)

 L’ensemble des critères qui suivent m’ont permis d’identifier mon sujet sur les photos comme étant un Alyte accoucheur, malgré sa couleur qui m’a interpelé :

_ Les mensurations : 40 – 50 mm maximum à l’âge adulte. L’apparence est dodue avec un museau court et arrondi.

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_ Les pattes postérieures : elles sont courtes et trapues.

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_ La peau du dos : elle est verruqueuse, avec les plus grosses verrues alignées. La coloration est généralement grisée à brunâtre avec aussi quelques tâches foncées. Elle peut être occasionnellement tachetée de vert. Sur chaque flanc, le repli latéro-dorsal se résume généralement à une ligne discontinue de pustules rougeâtres ou jaunes s’étendant du tympan à l’arrière-train (orangées sur mon sujet, sur certains clichés).

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_ Les yeux : ils sont dorés avec une pupille verticale ovale ou plus ou moins en losange.

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La forme de la pupille semble dépendre de l’angle de prise de vue ; elle peut varier aussi sans raison particulière (sinon la luminosité ?).

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_ Présence d’un disque, bien visible au niveau du tympan.

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Finalement, à partir des espèces susceptibles d’être présentes, les caractéristiques de la pupille et du cercle du tympan sont une bonne aide à la décision. J’ignorais jusqu’alors l’existence de ce petit crapaud dans la région! Il a une coloration dorsale quand même bien originale.

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III – Mode de vie de l’Alyte accoucheur

Maintenant que j’ai identifié mon crapaud, je me suis intéressé de près à cette espèce.

C’est une espèce terrestre qui vit toujours près des points d’eau calme, avec une végétation éparse. On le trouve au sein d’habitats assez diversifiés. Dans les Pyrénées, on le rencontre bien plus souvent en montagne qu’en plaine ; jusqu’à 2 400 m maximum, la limite supérieure de l’étage subalpin. Il est actif au crépuscule et il ne chasse que la nuit. Il se déplace très peu si le biotope lui est favorable. Le mâle a la particularité de porter les œufs de la femelle sur son dos.

Le chant du mâle, à une seule petite note flûtée, est très caractéristique et agréable à écouter. Vous pourrez vous en rendre compte en fin d’article.

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IV – La reproduction de l’Alyte accoucheur

L’accouplement et le développement des œufs de l’Alyte accoucheur ont lieu sur la terre ferme. Le mode de reproduction est très intéressant. Il commence début mars en plaine, jusqu’à fin juin/début juillet en altitude. Le soir ou la nuit, la femelle attirée par le chant du mâle pond en moyenne après l’accouplement une cinquantaine d’œufs, stimulée par ce dernier qui lui masse son cloaque afin de l’aider à leur expulsion. Il entortille le cordon autour de ses pattes postérieures où ils vont se développer. Il se réfugie dans la journée dans un endroit humide pour les protéger de la sécheresse. Le soir, il les humidifie régulièrement à un point d’eau pour permettre leur développement. Après un délai de 3 à 8 semaines, les têtards éclosent au cours d’un de ces mouillages et se métamorphosent ensuite dans l’eau. En plaine, cette métamorphose dure environ environ 6 mois après l’éclosion.

Des œufs abandonnés d’Alyte accoucheur (sous réserve, je ne suis pas sûr à 100%).

La durée du stade larvaire varie fortement avec l’altitude, la durée de la métamorphose active allant en diminuant au fur et à mesure que l’on s’élève. Ce sont les plus gros têtards rencontrés en montagne. Ils vont passer au moins un ou plusieurs hivers dans l’eau (jusqu’à 7-8 hivers en haute montagne), avant de se transformer en petit crapaud.

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V- Mes nouvelles rencontres avec un alyte accoucheur

Pratiquement un an plus tard, le 9 mai 2021, j’ai retrouvé un autre alyte accoucheur autour de mon plan d’eau. En comparant le réseau des veinules sur les yeux, j’ai tout de même vérifié qu’il était bien différent. Moins jaune que le précédent, il reste cependant assez original en coloration. Le voici en quelques photos, qui le présente sous toutes ses faces :

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09 mai 2021 – Mon deuxième Alyte accoucheur à la maison.

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18 août 2022 – 15 mois plus tard, je photographie à nouveau le même alyte accoucheur reconnaissable au réseau des veinules sur les yeux.

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07 mai 2023 – Toujours à la maison, un nouvel alyte accoucheur différent des 2 précédents.

A la corpulence, je dirais que c’est une femelle prête à pondre. Ses taches bleutées m’ont intrigué au premier abord. Puis, j’ai remarqué que sa patte arrière droite n’était pas complétement formée. Cela ne semblait pas la gêner dans ses déplacements.

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VI- Le chant de l’Alyte accoucheur mâle

La présence de ce petit crapaud autour de la maison se confirme, avec d’autres spécimens qui commencent à chanter dès le début du mois de mars et jusqu’à courant novembre (dernière manifestation sonore le 10 décembre en 2023).

Emis en soirée et durant la nuit, le chant est composé d’une seule note brève et espacée de 1 à 2 secondes avec des moments de silence de quelques secondes à quelques minutes.

L’alyte accoucheur est très discret et … méfiant. Plus que l’observation visuelle, c’est son chant qui va trahir sa présence. Quand j’ai écrit cet article, j’ai appris à le reconnaître et j’ai voulu l’enregistrer. A maintes reprises, je me suis rapproché avec précaution à quelques mètres de lui et le chant s’arrêtait alors que je ne l’avais toujours pas localisé. Manifestement, il prenait conscience de ma présence et cela le perturbait! J’étais trop loin pour enregistrer, jusqu’à cet été 2022 où il a fini par se prêter au jeu!

Eté 2022 – J’ai enfin pu faire un enregistrement du chant de l’alyte accoucheur mâle.

L’alyte chanteur dans un tas de galets, l’un de ces refuges favoris à la maison.

En fait, ils étaient deux à deux endroits différents et le chant de l’un en soirée déclenchait la réponse de l’autre, légèrement différente. Je n’irai pas jusqu’à dire que chacun avait son propre langage.

Ce chant peut être parfois confondu avec celui du Hibou petit duc (Otus scops) dans certaines régions.

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Article rédigé à partir de mes photos, de mes observations et d’articles dont je cite les liens :

_ http://terroir-nature78.org/inventairebatrac/index.html

_ http://www.naturemp.org/Alyte-accoucheur.html

_ http://www.naturemp.org/Pelodyte-ponctue.html

_ http://batrachos.free.fr/Etlesautres.htm#Pbrun

_ https://professionnels.ofb.fr/sites/default/files/pdf-especes/Alyte_accoucheur.pdf

_ https://www.batraciens-reptiles.com/la reproduction des amphibiens anoures